IMAJE

En 1982, je crée avec quelques amis la société IMAJE. L’histoire de son logo est relatée dans mon livre « Marquons notre temps », contribution au débat sur l’entreprise. Je reprends ci-après l’essentiel du texte. 

« L’histoire se situe quelques semaines avant la date fatidique du 4 avril 1982 ou IMAJE, Imprimantes à Jet d’Encre commença officiellement son activité. Réunion chez Jean-Paul Maingaud, dans sa salle à manger de Bésailles. Nous n’avions pas d’autre choix que de terminer notre tâche à la fin de la matinée. Terminer notre tâche, le mot est bien choisi. En effet, je ne sais plus si c’est Jean-Paul ou Luc Regnault qui avait apporté des tubes d’encre de Chine. L’un d’eux se saisit d’un tube et laissa tomber de trente centimètres une tâche puis une autre, sur une feuille de papier. 

Je me surprends à dire « laisser tomber une tâche ». Cette imprécision est révélatrice de l’idée inconsciente que je me suis faite de ce geste. C’était comme si la tâche avait émergé directement du canal de sortie de la cartouche d’encre de Chine, expulsée telle qu’elle par la pression d’un doigt sur son fond de caoutchouc. En réalité, c’était bien la goutte qui tombait et qui suivant la hauteur ou les variantes de son atterrissage donnait une forme plus ou moins ronde et plus ou moins étoilée. Il en fut une qui plut à chacun d’entre nous quatre. Encore une bizarrerie avec l’interférence du verbe pleuvoir des gouttes. Le groupe s’appropria la tâche pour en faire le point sur le « i » de IMAJE. On écrivit des dizaines de IMAJE de manière cursive, un peu en manière de signature. Dans cet exercice, mon geste était coulé, car ma signature habituelle se déployait déjà naturellement dans les boucles des jambes du « M » qui est doublé dans mon nom. Le geste à déployer pour écrire IMAJE s’extrapola naturellement de cette signature. 

L’équipe convergea sur le résultat de l’un de ces gestes libérés, parmi cinquante ou plu. Cela nous dota d’un beau graphisme et ce qui est plus important permit une totale appropriation collective. Chacun se sent encore et à juste titre aujourd’hui co-auteur de ce signe qui allait tant nous servir sur tous les continents. Plus qu’un sigle commercial, il allait avoir tous les attributs d’une signature. La signature est un signe qui contient une multitude d’informations. Elle peut atteindre à une forme de perfection qui résulte à la fois d’une maîtrise corporelle, d’une stabilité émotionnelle, et d’une densité spirituelle. Elle se nourrit à la fois de l’histoire de la famille et de l’histoire personnelle. Signature collective, le logo IMAJE serait au cœur de notre histoire. 

Le journal « Les échos » nous gratifia quelques années plus tard du prix du logo d’entreprise. » Vers 1986, le moment était venu de sonder le marché Japonais. Une foire était organisée à Kobe pour les entreprises étrangères au Japon qui voulaient montrer leur produit. Je fis le voyage avec Luc Regnault le directeur technique concepteur des machines d’impression. Le japonais fut séduit par les machines, mais aussi par le logo qui sortait tellement des standards des logos industriels. Ils nous le disaient en faisant moult courbettes. Par ailleurs, la couleur que nous avions choisie était celle de l’Empereur. Cette initiative fut suivie de la création d’une filiale et d’une pénétration très importante du marché face à Hitachi.