Mes beaux-Parents 

Jules Paubel, alias Hubert Paubel était un classard de mon père. Contrairement à mon père il avait fréquenté l’école publique de Marboz, tout en ayant reçu une éducation religieuse catholique. Jules avait été traumatisé par la sorte d’apartheid dont il faisait l’objet à l’église, car il y était placé à l’écart des enfants qui allaient à l’école libre. Cet ostracisme était dans les têtes de la population. Il y avait « les gens bien et les autres ».  Pour être un bon chrétien, à force de vouloir être meilleur que les autres, les gens finissaient par ne plus l’être. Mon beaux-pere n’était pas pratiquant. Ma belle-mere céssa de pratiquer au décès de sa mere. Suzette et Jacques, son frère, n’avaient eux-mêmes jamais fréquenté l’école libre. Leur éducation religieuse avait été prodiguée par des aumôniers. 

Mon beau-père avait rencontré « la Raymonde » alors qu’il avait été envoyé à Vals-les-Bains en Ardèche pour participer à l’encadrement des prisonniers allemands après la guerre.

Mon beau-père était démarcheur à la Société Générale, mais il avait aussi une activité agricole, principalement arboricole. Il avait la main verte et il complétait ainsi les revenus de la famille. Il avait été le premier au village, dans les années 60, à implanter un verger de prunes japonaises. Cela m’avait marqué.  

Il faisait son vin à partir de souches de Couderc 7120 qu’il renouvela par des plans greffés de Sirha de Grenache et de Mourvèdre. Dans les années 1970, à la suite d’une opération de la hanche, il décida de les arracher. Il conserva un cep de 7120 à ma demande compte tenu de mon goût pour cette vieille vigne.

Ma belle-mère avait perdu son père très jeune du tétanos. Sa maman avait eu en charge toute la famille avant d’être elle-même à leur charge à la suite d’attaques successives. J’ai connu l’époque où des reliquats d’activité paysanne étaient encore de mise comme l’élevage d’une chèvre pour le fromage et la cueillette des châtaignes. 

Ma belle-mère, travailleuse sans statut, a tenu la barque avec conscience, compétence et abnégation. Son grand-père, Paul Cayraire avait été maire du village de Mercuer à deux reprises au tournant du siècle. Après la mort de ma mère quelques années après notre mariage, elle m’a fait un énorme cadeau en acceptant que je l’appelle maman.

Le fait de m’investir dans une valorisation du lieu, en créant le jardin dans l’environnement de la propriété familiale, est pour moi un devoir en rapport avec le respect que m’a inspiré tout le travail qu’il a accompli avec ma belle-mère à la suite des ancêtres de la famille. 

Mon beaux-père plante ses pommes de terre pour la dernière fois.

Ma belle-mère 89 ans rend visite à mon beau-père 91 ans à la maison de retraite en août 2013.